Position de la CES sur l'agenda «Mieux légiférer» – pour les personnes et la planète, pas pour le profit

 Adoptée lors de la réunion du Comité exécutif des 10-11 décembre 2024

Dans une Union fondée sur l'État de droit, les droits de l'homme et la démocratie, la réglementation doit servir l'intérêt général. Une économie sociale de marché hautement compétitive est un outil au service du développement durable, du plein emploi, du progrès social et d'un niveau élevé de protection de l'environnement, objectifs fondamentaux de l'UE énoncés à l'article 3 du Traité UE. Il est clair que la compétitivité n'est pas une fin en soi et que les forces du marché ne sont pas au-dessus de la loi. Tout effort visant à rendre la législation européenne plus claire, plus simple, plus efficace et plus accessible doit être réalisé dans l'intérêt des personnes et de la planète, et non dans l'intérêt du pouvoir et du profit des entreprises. La démocratie, la réglementation, le dialogue social et la négociation collective sont tous nécessaires pour répondre aux besoins sociaux et environnementaux de notre époque.

La CES est préoccupée par la résurgence d'un programme de déréglementation de l'UE, clairement reflété dans les orientations politiques 2024-2029 de la Commission Von der Leyen II[i] et intégré dans les lettres de mission[ii] de tous les commissaires entrants. L'idée que la législation de l'UE est pesante est réductrice et représente une menace pour le projet européen. Ce dénigrement de l'UE sape la confiance dans les institutions, alimentant l'euroscepticisme et l'extrême droite. Une approche déréglementaire de la compétitivité n'a pas sa place dans une Europe où les lacunes en matière de protection et les violations des droits des travailleurs, des syndicats et des droits sociaux persistent, en raison du non-respect, de l'application laxiste, de l'impunité et des lacunes réglementaires. 

La pression en faveur d'une réduction des coûts et des charges administratives, déclaratives et réglementaires privilégie les intérêts des entreprises au détriment de la démocratie et des besoins de la société. L'intérêt général ne se compose pas seulement des entreprises, mais aussi des travailleurs et des syndicats, des consommateurs, des citoyens et des communautés, des régions, des autorités publiques et de l'environnement. En se concentrant presque exclusivement sur la quantification des coûts économiques à court terme pour la mise en conformité et les ajustements, le programme «Mieux légiférer» ignore les impacts sociaux, environnementaux et économiques positifs d'une législation de qualité 

en tant qu'investissement à long terme pour la société.

Si la pandémie de 2020 a démontré la nécessité d'une réglementation pour agir dans l'intérêt public et gérer une crise, la crise financière de 2008 a également illustré comment l'absence de réglementation peut même provoquer une crise, et de quelle manière la déréglementation et la marchandisation peuvent avoir des conséquences dévastatrices pour le tissu social européen et les services publics. 

L'UE ne peut pas se permettre de revenir à l'austérité. Au fil des années d'intégration européenne, le coût du manque d’initiatives législatives en Europe (the cost of non-Europe) s'est avéré bien plus important que les investissements réglementaires pour une Europe plus sociale.[iii] La CES rappelle sa résolution 2020 «Mieux légiférer» pour tous dans l’UE[iv], et continuera à se battre pour préserver et renforcer les droits des travailleurs et l'acquis social de l'UE, et empêcher toute pression à la baisse sur les salaires ou la négociation collective.

La CES appelle à un programme d'amélioration de la réglementation qui reconnaisse les mérites d'une législation de qualité en termes d'objectif et de valeur ajoutée pour la société, et non en termes de coûts et d'économies pour les entreprises. D'innombrables études scientifiques démontrent les avantages sociétaux que la réglementation peut apporter en termes monétaires et non monétaires, ainsi que l'impact négatif des pratiques commerciales néfastes en termes d'augmentation des inégalités, d'exploitation du travail et de perturbations écologiques. Pourtant, ces aspects ne sont pas sérieusement pris en compte dans l'élaboration des politiques de l'UE. Dans le même temps, aucune considération n'est accordée aux coûts réels ou aux avantages supposés des méthodes de travail de la Commission, compte tenu de toutes les ressources, procédures internes et limites qu'elle impose au processus législatif.

La CES demande qu'un test de progrès social soit ajouté à la boîte à outils de l'amélioration de la réglementation[v] afin de garantir que toutes les propositions politiques sont socialement responsables et promeuvent le dialogue social et la négociation collective. Ce test devrait être supervisé par l'Envoyé européen pour le dialogue social[vi] afin de rééquilibrer le programme «Mieux légiférer», étant donné que les nouveaux tests sur la compétitivité et les PME ne font que renforcer son orientation économique actuelle. Les évaluations d'impact de la Commission devraient accorder autant d'attention aux aspects sociaux et environnementaux qu'aux aspects économiques, et avec le même niveau de détail, en spécifiant également les coûts de l'inaction et en évaluant les effets à long terme de la politique «un ajout, un retrait» (‘one in, one out’) sur toutes les parties prenantes concernées.

Dans le même ordre d'idées, le prochain renouvellement de l'accord interinstitutionnel «Mieux légiférer» devrait remédier à ces déséquilibres en renforçant l'évaluation des impacts qualitatifs. Cela devrait inclure une réforme du comité d'examen de la réglementation afin de s'assurer qu'il respecte les normes démocratiques en termes de transparence, d'expertise et de représentation, avec des contrôles et des contrepoids clairs sur l'exercice de son mandat. La CES rejette une négociation interinstitutionnelle menée par la Commission dans le but de simplement imposer sa propre méthodologie restrictive au Parlement européen et au Conseil pour évaluer les amendements législatifs substantiels, risquant ainsi de retarder, de limiter et d'anticiper davantage le processus démocratique. Au contraire, l'accord devrait respecter la marge de manœuvre des colégislateurs et améliorer la transparence et la responsabilité du processus législatif.

Au nom de la compétitivité européenne, la Commission Von der Leyen II entend soumettre l'ensemble de l'acquis communautaire à un test de résistance. Ce processus sera coordonné par un commissaire chargé de la simplification et de la mise en œuvre, qui chargera chaque membre du collège d'identifier les possibilités de simplifier la législation et sa mise en œuvre, et de réduire les charges administratives et les exigences en matière de rapports pour les entreprises. Cette approche à court terme de la compétitivité se retrouve également dans le rapport Draghi de 2024 sur l'avenir de la compétitivité européenne[vii] , rapport qui fait l'éloge du modèle social européen, mais ne parvient pas à faire le lien entre des niveaux de vie élevés et une législation de qualité, appelant au contraire l'UE à faire preuve d'autolimitation en matière de réglementation. De même, le rapport Letta 2024 sur l'avenir du marché unique[viii] recommande une plus grande libéralisation et l'utilisation de législations ‘tests’ (regulatory ‘sandboxes’) , critiquant l'UE pour son approche de la réglementation peu encline au risque, ignorant ainsi complètement le principe de précaution prévu par les traités. Au contraire, une réglementation à l'épreuve du temps contribue à stimuler et à façonner l'innovation, en veillant à ce qu'elle serve l'intérêt général et ne porte pas atteinte aux droits et aux normes existants. 

Les effets protecteurs et redistributifs de la législation ouvrent la voie à une société plus égalitaire et cohésive, avec des règles du jeu équitables. L'amélioration des conditions de travail et de vie ne peut être considérée comme un frein à la compétitivité, mais constitue un élément clé d'une économie équitable, durable et résistante. Les mauvaises conditions de travail, les salaires médiocres et les pratiques d'emploi abusives sont à l'origine de la concurrence déloyale, des pénuries de main-d'œuvre et des modèles d'entreprise qui privilégient la distribution de bénéfices sous forme de dividendes et de primes au lieu de les réinvestir. Prendre au sérieux la compétitivité signifie prendre au sérieux la création d'emplois de qualité dans tous les secteurs et dans toutes les régions, avec de meilleures conditions et des salaires plus élevés, grâce à un dialogue social renforcé, à la négociation collective et à une démocratie effective sur le lieu de travail. 

La CES réfute les accusations de "sur-réglementation" des directives européennes et rejette fermement les approches basées sur une harmonisation maximale, visant à remplacer les directives par des règlements, ou la législation par des actes délégués et des actes d'exécution, ou pire encore, par des mécanismes privés et non démocratiques d'établissement de normes. L'établissement de normes plus élevées au niveau national est un objectif légitime pour tout État membre en vertu des Traités. En particulier, les mesures de politique sociale de l'UE sont mises en œuvre par le biais de directives qui respectent les spécificités des systèmes nationaux de relations industrielles et le rôle unique des partenaires sociaux. Le dialogue social et le partenariat sont inhérents au modèle social européen et à la démocratie à tous les niveaux. En gardant à l'esprit les prérogatives des partenaires sociaux, le dialogue social européen et les consultations des partenaires sociaux ne doivent pas être sapés par les consultations publiques ouvertes, les panels de citoyens, les forums  de transposition ou autres plateformes de contrôle de terrain entrepris par la Commission. Pour que ces instruments contribuent effectivement à mieux légiférer, ils doivent garantir des processus démocratiques et transparents avec une participation équilibrée et représentative, impliquant également les syndicats.

La CES regrette que l'approche de la Commission en matière d'application soit principalement axée sur la mise en œuvre et les procédures d'infraction plutôt que sur la garantie d'une meilleure application et d'un meilleur contrôle sur le terrain. En ce qui concerne la numérisation, son potentiel ne se limite pas à la simplification, mais les outils numériques devraient contribuer à améliorer le respect des règles et la coopération transfrontalière. Un contrôle et une application efficaces des règles applicables nécessitent l'accès aux données nécessaires pour vérifier la conformité, évaluer les risques, mieux cibler les contrôles, réaliser des audits et informer les futures mesures politiques. Toutefois, ces efforts risquent d'être compromis par l'objectif de 25 % (35 % pour les PME) que s'est fixé la Commission pour réduire les obligations de déclaration des entreprises. Il s'agit là d'une nouvelle mesure arbitraire qui vient s'ajouter au calculateur «un ajout, un retrait» (‘one-in, one-out’) et qui a été fixée sans aucune considération préalable pour les objectifs politiques que ces exigences poursuivent. La CES rejette de tels objectifs numériques qui ne tiennent absolument pas compte de la nécessité d'une application et d'une mise en œuvre efficaces de la législation européenne. De même, la CES est très préoccupée par l'extension de la définition des PME afin d'inclure également les petites et moyennes entreprises[ix]. La définition existante englobe déjà 99,8% de toutes les entreprises de l'UE, employant près de 90 millions de personnes et représentant près des deux tiers de l'emploi dans le secteur privé.[x] L'initiative «Mieux légiférer» doit permettre de mieux légiférer pour tous, et non de proposer des solutions de repli, qui se traduisent  par l'établissement de systèmes à deux vitesses ou de normes pour une fraction réduite d'acteurs économiques dans  l'Union européenne.

La CES rappelle que la Commission européenne, en tant que gardienne des Traités, doit servir l'intérêt général en promouvant la justice et la protection sociales, l'égalité entre les femmes et les hommes, la solidarité entre les générations et la protection des droits de l'enfant, ainsi que la cohésion économique, sociale et territoriale et la solidarité entre les États membres. Définis à l'article 3 du Traité UE, ces objectifs fondamentaux de l'UE devraient également guider le programme d'amélioration de la réglementation, de manière à soutenir nos efforts communs en vue d'une amélioration constante des conditions de vie et de travail en Europe.

Annexe I

Exemples d'impact de l'agenda «Mieux légiférer» de l'UE

La nature paradoxale du programme d'amélioration de la réglementation de l'UE[xi] poursuivi par la Commission Von der Leyen a eu un impact négatif évident sur le processus législatif de l'UEEn 2019, l'exécutif européen a introduit unilatéralement une politique «un ajout, un retrait» (‘one-in, one-out’), sans aucune base juridique dans les Traités, sans consultation préalable ni évaluation d'impact.[xii] Cette politique s'est avérée être un exercice comptable arbitraire, poussant à une quantification et une monétisation accrues dans le seul but de compenser les coûts à court terme pour les entreprises, tout en ignorant les économies à long terme et les avantages qualitatifs pour les personnes, la planète et le public. Elle est loin d'être neutre sur le plan politique et ne contribue pas à la qualité de la législation. Ces préoccupations sont clairement identifiées par l'ETUI[xiii], l'AK[xiv] et le Parlement européen[xv], mais elles sont également reflétées dans les documents de la Commission. [xvi]

Parallèlement, la plateforme ‘Fit for Future’[xvii] créée en 2021 s'est avérée n'être rien d'autre que la continuation de l'ancienne plateforme REFIT de la Commission, avec une représentation déséquilibrée des parties prenantes, des procédures non transparentes et des choix de sujets imprévisibles, avec peu d'intérêt pour la protection de l'avenir. Tout en essayant de présenter cette entreprise comme un succès, la Commission a informé en 2024 que la plateforme avait tenu sa dernière réunion. [xviii]

Malgré plusieurs enquêtes du Médiateur européen, les problèmes du comité d’examen de la réglementation (RSB) de la Commission persistent également en termes de transparence[xix] , d'indépendance, d'expertise diversifiée[xx] et de légitimité démocratique[xxi] pour remettre en question, retarder ou même opposer son veto à des propositions législatives. L'annonce de la nomination d'un représentant des PME qui participera aux auditions du RSB ne fait que renforcer ces inquiétudes.[xxii] Dans le même ordre d'idées, le Médiateur a également exprimé ses préoccupations quant à la manière dont la Commission prend en compte les commentaires reçus dans le cadre des consultations publiques ouvertes.[xxiii]

Alors que la Commission s'engage publiquement à garantir qu'une réduction des obligations de déclaration pour les entreprises ne compromettra pas les objectifs politiques de l'UE ou les normes sociales et environnementales élevées, le journalisme d'investigation[xxiv] a révélé que son objectif de réduction de 25 % a été fixé sans aucune base factuelle. Des documents internes de la Commission décrivent comment l'IA a été utilisée pour identifier un total de 11 000 obligations d'information dans plus de 23 000 textes législatifs de l'UE. Sur ce total, les services de la Commission n'ont pu identifier que 190 obligations inutiles. Pourtant, la hiérarchie politique n'a cessé d'insister sur l'intensification des efforts visant à réduire les charges pesant sur les entreprises.[xxv] Cela risque de compromettre les objectifs politiques actuels et futurs, comme l'illustre la proposition de directive sur les stages pour 2023. Au cours de sa phase d'élaboration, le comité d’examen de la réglementation a, d'une part, remis en question le manque de données justificatives et, d'autre part, s'est interrogé sur la nécessité de nouvelles obligations d'information pour les entreprises.[xxvi]

La suppression arbitraired'exigences sans une bonne compréhension des objectifs qu'elles poursuivent peut gravement compromettre le contrôle efficace des normes sociales et environnementales ainsi que des normes économiques. Par exemple, la suppression des contrôles de sécurité obligatoires sur les machines à haut risque en 2006 a eu pour conséquence que davantage de travailleurs en Europe ont été blessés par des machines, et en 2022, les colégislateurs ont décidé de réintroduire cette obligation dans le cadre de la directive sur les machines.[xxvii] De même, le fait d'omettre les PME dans les rapports financiers peut permettre aux sociétés holding de s'engager dans des arrangements artificiels, comme l'a montré en 2023 la plus grande faillite jamais enregistrée dans l'immobilier européen.[xxviii] En 2024, la Commission a présenté une proposition de déclaration électronique sur le détachement en vue de réduire les obligations de déclaration pour les employeurs, bien que les charges administratives liées à la déclaration des travailleurs détachés soient estimées à seulement 17,29 millions d'euros au total dans l'UE.[xxix] Tout en considérant que le coût moyen de 10,78 euros par déclaration dans l'UE devrait être encore réduit, la Commission n'a pas fait d'estimations concernant les risques potentiels et les coûts sociaux d'une moindre déclaration, et n'a pas évalué correctement les besoins d'information des inspections du travail pour faire appliquer efficacement les règles sur le détachement.[xxx]

L'approche de la Commission en matière de législation s'est avérée non seulement controversée, mais aussi contradictoire. Par exemple, en 2022, l'enquête annuelle sur les charges de la Commission[xxxi] a estimé à 33 millions d'euros le coût pour les entreprises de la protection des travailleurs contre l'amiante, ignorant complètement les obligations des employeurs de garantir des lieux de travail sûrs ou considérant la valeur ajoutée de la santé et de la sécurité au travail pour les travailleurs individuels ainsi que pour la société. À la fin de l'année 2023, la Commission a affirmé que l'approche «un ajout, un retrait» (‘one-in, one-out’), adoptée depuis 2022 avait généré 7,3 milliards d'euros d'économies administratives.[xxxii] Toutefois, ce chiffre contraste fortement avec les bénéfices générés même par des initiatives législatives individuelles. La législation n'est pas un jeu à somme nulle.

Au cours de la législature 2019-2024, des initiatives phares de l'UE telles que le pacte vert européen et le paquetFit for 55’ ont abouti à des ajouts importants à l'acquis de l'UE, abordant le changement climatique, orientant l'innovation dans une direction plus respectueuse de l'environnement et encourageant les entreprises à être compétitives sur la base de pratiques commerciales plus durables. De même, la directive sur les travailleurs des plateformes 2024 garantit que l'innovation ne débouche pas sur des modèles d'entreprise numériques dont la compétitivité repose sur un vide réglementaire. Ce type de mesures ne peut être compensé par une réduction équivalente des coûts et des charges pour les entreprises, d'autant plus que les estimations montrent que la réglementation de l'économie de plateforme peut générer des bénéfices globaux d'une valeur de 47 milliards d'euros par an. De même, des politiques vertes ambitieuses peuvent augmenter le PIB de l'UE de 2 % d'ici à 2030 et de 4 % d'ici à 2050.[xxxiii]

Inversement, des études menées par la Commission[xxxiv], l'Autorité européenne du travail[xxxv] et la Plate-forme européenne de lutte contre le travail non déclaré[xxxvi] montrent que les lacunes réglementaires qui permettent aux sous-traitants, aux intermédiaires du travail et aux sociétés boîtes aux lettres d'opérer librement sur le marché intérieur de l'UE posent de sérieux problèmes aux travailleurs, aux autorités chargées de faire respecter la législation et aux employeurs de bonne foi. Il est clair que l'inaction législative, l'impunité et l'absence de mise en œuvre ont un coût pour la société, sous la forme de violations des droits sociaux, de salaires, d'impôts et de cotisations de sécurité sociale impayés, d'accidents du travail, de difficultés d'application pour les autorités et d'une concurrence déloyale entre les entreprises. En outre, les rapports décrivent comment les entreprises et les groupes de pression s'appuient sur les mécanismes d'exécution et les procédures d'infraction de l'UE pour contester les normes sociales et environnementales prévues par le droit national, en les présentant comme des obstacles au marché intérieur. Les exemples vont des multinationales cherchant à faire des profits dans le secteur des soins de santé aux investisseurs spéculant sur les logements sociaux.[xxxvii]

Cet accent mis sur la réduction des coûts et des charges pour les entreprises est clairement influencé par le lobbying de l'industrie. En 2024, les colégislateurs de l'UE ont convenu de reporter de deux ans la mise en œuvre de la directive sur l'établissement de rapports sur le développement durable des entreprises, afin de permettre aux entreprises de se concentrer sur le minimum nécessaire en termes de rapports.[xxxviii] La Commission a également fait une proposition similaire en 2024 pour retarder d'un an la mise en œuvre du règlement sur la déforestation, présentée comme un soutien renforcé à l'introduction progressive. En outre, les organisations européennes d'employeurs ont publié une déclaration commune avec des demandes similaires concernant la directive sur le devoir de diligence en matière de développement durable des entreprises adoptée en 2024, appelant à un contrôle de la compétitivité en vue de simplifier les exigences et de réduire les charges.[xxxix] Lors d'un sommet social européen en 2024, les organisations d'employeurs ont également cité la directive sur la transparence des rémunérations comme une autre charge réglementaire qui, selon elles, devrait être traitée dans le cadre du programme européen d'amélioration de la réglementation.[xl]


[i] Commission européenne (2024) : Orientations politiques de la présidente Ursula von der Leyen https://commission.europa.eu/document/download/e6cd4328-673c-4e7a-8683-f63ffb2cf648_en?filename=Political%20Guidelines%202024-

2029_EN.pdf 

[ii] Commission européenne (2024) : Lettres de mission des commissaires (2024) - https://commission.europa.eu/about-european-

commission/towards-new-commission-2024-2029/commissioners-designate-2024-2029_en

[iii] Service de recherche du Parlement européen (2023) : Cartographie des coûts de la non-Europe - dfdhttps://www.europarl.europa.eu/thinktank/en/document/EPRS_STU(2023)734690 

[iv] CES (2020) : Résolution sur l'amélioration de la réglementation de l'UE pour tous - https://www.etuc.org/en/document/etuc-resolution-eu-better-regulation-all-adopted-executive-committee-28-and-29-october 

[v] Commission européenne (2023) : Boîte à outils pour une meilleure réglementation - https://commission.europa.eu/law/law-making-process/planning-and-proposing-law/better-regulation/better-regulation-guidelines-and-toolbox_en 

[vi] Déclaration de La Hulpe (2024) : L'avenir du pilier européen des droits sociaux https://wayback.archive-it.org/12710/20240718201809/https://belgian-presidency.consilium.europa.eu/media/bj0adazv/declaration-finale.pdf 

[vii] Mario Draghi (2024) : Rapport sur l'avenir de la compétitivité européenne https://commission.europa.eu/topics/strengthening-european-competitiveness/eu-competitiveness-looking-ahead_en#paragraph_47059 

[viii] Enrico Letta (2024) : Rapport sur l'avenir du marché unique - https://www.consilium.europa.eu/media/ny3j24sm/much-more-than-a-market-report-by-enrico-letta.pdf

[ix] Commission européenne (2003) : Recommandation sur la définition des micro, petites et moyennes entreprises https://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/?uri=CELEX:32003H0361 

[x] Commission européenne (2024) : Rapport annuel sur les PME européennes https://single-market-economy.ec.europa.eu/document/download/2bef0eda-2f75-497d-982e-c0d1cea57c0e_en?filename=Annual%20Report%20on%20European%20SMEs%202024.pdf 

[xi] Commission européenne (2021) : Communication sur l'amélioration de la réglementation - Unir nos forces pour mieux légiférer https://eur-lex.europa.eu/legal-content/en/ALL/?uri=CELEX:52021DC0219 

[xii] Commission européenne (2019) : Communication du Président sur les méthodes de travail - https://commissioners.ec.europa.eu/document/download/0dbda7ed-b7fb-4d7e-9e62-6c8b0f54be62_en?filename=working-methods.pdf

[xiii] Institut syndical européen (2021) : "One in, one out" - Une approche incongrue des grands défis européens https://www.etui.org/publications/one-one-out-incongruous-approach-major-european-challenges

[xiv] AK Europa (2024) : Mieux légiférer dans l'UE - Créer un terrain de jeu pour les entreprises au détriment des politiques sociales et environnementales https://www.akeuropa.eu/sites/default/files/2024-11/Studie%20Better%20Regulation%20FINAL.pdf

[xv] Service de recherche du Parlement européen (2023) : Le principe "One in, One out" - Un véritable outil pour mieux légiférer ? - https://www.europarl.europa.eu/RegData/etudes/STUD/2023/753421/IPOL_STU(2023)753421_FR.pdf 

[xvi] Commission européenne (2021) : Enquête annuelle sur les charges https://commission.europa.eu/document/download/9d243918-55d8-4ca4-b6c6-9fefa5c048b9_en?filename=annual-burden-survey_2021_en.pdf 

[xvii] Commission européenne (2024) : Plateforme "Fit for Future" 2019-2024 https://commission.europa.eu/law/law-making-process/evaluating-and-improving-existing-laws/refit-making-eu-law-simpler-less-costly-and-future-proof/fit-future-platform-f4f-2021-2024_en 

[xviii] Commission européenne (2024) : La plateforme "Fit for Future" a contribué de manière significative à la simplification et à la modernisation du droit de l'UE au cours de son mandat de quatre ans https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/en/ip_24_5309 

[xix] Médiateur européen (2024) : Décision sur l'accès du public à l'avis du comité de surveillance de la réglementation https://www.ombudsman.europa.eu/en/solution/en/192668 

[xx] Médiateur européen (2024) : Décision sur l'indépendance et l'expertise du conseil de surveillance de la réglementation https://www.ombudsman.europa.eu/en/news-document/en/192602 

[xxi] Médiateur européen (2023) : Décision relative à l'accès du public aux déclarations d'intérêts des membres du comité de surveillance de la réglementation https://www.ombudsman.europa.eu/en/decision/en/175979 

[xxii] Commission européenne (2023) : Programme de travail 2024 - https://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/?uri=CELEX%3A52023DC0638

[xxiii] Médiateur européen (2022) : Décision relative à la conduite d'une consultation publique sur la gouvernance d'entreprise durable https://www.ombudsman.europa.eu/en/decision/en/164023 

[xxiv] Commission européenne (2024) : Compte rendu de l'audition parlementaire de Valdis Dombrovskis, commissaire désigné à l'économie et à la productivité, à la mise en œuvre et à la simplification https://hearings.elections.europa.eu/documents/dombrovskis/dombrovskis_verbatimreporthearing-original.pdf

[xxv] Suivez l'argent (2024) : L'UE ne parvient pas à réduire la paperasserie, malgré ses promesses https://www.ftm.eu/articles/less-eu-bureaucracy-promise-unfeasible

[xxvi] Commission européenne (2023) : Proposition de directive relative à l'amélioration et à l'application des conditions de travail des stagiaires et à la lutte contre les relations de travail régulières déguisées en stages https://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/?uri=CELEX%3A52024PC0132 

[xxvii] CES (2022) : Les contrôles de sécurité sur les machines dangereuses rétablis après 15 ans https://www.etuc.org/en/pressrelease/safety-checks-dangerous-machines-restored-after-15-years 

[xxviii] AK Europa (2024) : Mieux légiférer dans l'UE - Créer un terrain de jeu pour les entreprises au détriment des politiques sociales et environnementales https://www.akeuropa.eu/sites/default/files/2024-11/Studie%20Better%20Regulation%20FINAL.pdf

[xxix] Commission européenne (2024) : Proposition et documents de travail du personnel pour un portail de déclaration numérique unique pour les entreprises fournissant des services https://single-market-economy.ec.europa.eu/publications/proposal-public-interface-declaring-posted-workers_en 

[xxx] CES (2024) : Travailleurs détachés - Les coûts sociaux du plan de la Commission l'emportent sur les économies https://www.etuc.org/en/pressrelease/posted-workers-social-costs-commission-plan-outweigh-savings

[xxxi] Commission européenne (2022) : Enquête annuelle sur la réduction des charges https://commission.europa.eu/document/download/fb29f07c-3c53-42ce-8d16-862fbb38c076_en?filename=ABS_20230912_0.pdf 

[xxxii] Commission européenne (2023) : Programme de travail 2024 - https://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/?uri=CELEX%3A52023DC0638

[xxxiii] Service de recherche du Parlement européen (2023) : Cartographie du coût de la non-Europe https://www.europarl.europa.eu/thinktank/en/document/EPRS_STU(2023)734690 

[xxxiv] Commission européenne (2024) : Étude à l'appui du suivi de la directive 2018/957/UE sur le détachement des travailleurs et de la directive 2014/67/UE sur l'exécution - https://op.europa.eu/en/publication-detail/-/publication/d06f8af4-02bd-11ef-a251-01aa75ed71a1/language-en

[xxxv] Autorité européenne du travail (2023) : Secteur de la construction - Questions relatives à la fourniture d'informations, à l'application de la législation sur la mobilité de la main-d'œuvre, aux règlements de coordination de la sécurité sociale et à la coopération entre les États membres https://www.ela.europa.eu/sites/default/files/2023-09/ELA_construction-sector-report-2023.pdf 

[xxxvi] Plate-forme européenne sur le travail non déclaré (2021) : Lutte contre le travail non déclaré dans les chaînes d'approvisionnement https://www.ela.europa.eu/sites/default/files/2023-03/Tackling-undeclared-work-in-supply-chains.pdf

[xxxvii] Corporate Europe Observatory (2023) : 30 Years of EU Single Market - Time to remove the obstacles to social-ecological transformation (30 ans de marché unique européen - Il est temps d'éliminer les obstacles à la transformation sociale et écologique) - https://corporateeurope.org/sites/default/files/2023-06/30%20Years%20of%20EU%20Single%20Market-Report-Final.pdf 

[xxxviii] Conseil de l'UE (2024) : Le Conseil adopte une directive visant à retarder les obligations de déclaration pour certains secteurs et entreprises de pays tiers https://www.consilium.europa.eu/en/press/press-releases/2024/04/29/council-adopts-directive-to-delay-reporting-obligations-for-certain-sectors-and-third-country-companies/ 

[xxxix] Déclaration conjointe des organisations européennes d'employeurs (2024) : Vers des règles européennes de diligence raisonnable qui fonctionnent pour tous https://www.smeunited.eu/admin/storage/smeunited/joint-trade-association-statement-towards-eu-due-diligence-that-works-for-all.pdf 

[xl] CES (2024) : Les patrons affirment que la transparence des salaires est un "fardeau réglementaire" -https://www.etuc.org/en/pressrelease/bosses-claim-pay-transparency-regulatory-burden