Pour l’UE, c’est la dernière chance de répondre au ressentiment populaire à son égard. Tel est l’avertissement lancé par La Confédération européenne des syndicats (CES) à la Commission européenne.
Lundi prochain, 23 janvier, la Commission européenne dévoilera ses dernières réflexions en matière de politique et de législation sociale lors d’une conférence intitulée « The European Pillar of Social Rights: going forward together » (Le socle européen des droits sociaux : avançons ensemble) que donneront le Président Juncker et la Commissaire Thyssen.
« Le Président Juncker a été élu par le Parlement européen sur la promesse d’une Europe plus juste et plus sociale », a déclaré Luca Visentini, Secrétaire général de la CES. « Le très attendu socle des droits sociaux est pour lui l’occasion de tenir cette promesse. »
« L’UE a une dernière chance de répondre à la colère des travailleurs à son égard. Elle peut soit ignorer cette colère, soit veiller à améliorer le sort des travailleurs. »
« Nous attendons une approche ambitieuse de la part de la Commission européenne dans laquelle les droits sociaux sont favorisés et défendus avec la même urgence et le même engagement que les règles économiques et budgétaires. »
La CES souhaite des propositions ambitieuses qui :
- incluent des droits exécutoires ainsi que des critères de référence et des recommandations ;
- améliorent les droits sociaux et le niveau de vie ;
- prévoient des investissements en faveur de services publics forts, des emplois et de la qualité de l'emploi et d’une croissance durable ;
- encouragent le dialogue social, la négociation collective et les augmentations salariales afin de soutenir la demande économique et de combattre les inégalités ;
- aillent au-delà de la zone euro et de normes minimales.
« La CES a fait tout ce qu’elle pouvait pour convaincre la Commission européenne de la nécessité d’agir avec ambition et de manière résolue en faveur des droits sociaux pour les travailleurs », prolonge Esther Lynch, Secrétaire confédérale de la CES. « Il faut maintenant que cette Europe sociale « triple A » soit à la hauteur de ce qui a été promis. »
Les propositions de la Commission ne seront étudiées et acceptées par les syndicats européens que si elles font une différence réelle et positive dans la vie des travailleurs.
Une importante revendication de la CES porte sur des propositions législatives visant à encourager le travail de qualité et à mettre fin aux changements incessants générant flexibilité et précarisation, par exemple à travers une meilleure réglementation des plateformes en ligne et une meilleure application des droits existants s’accompagnant de droits pour les travailleurs indépendants. Ces propositions doivent garantir le modèle social reposant sur les droits syndicaux et protéger les conventions collectives, particulièrement dans le contexte de la libre circulation. Elles doivent également introduire de meilleures règles économiques afin que les travailleurs puissent négocier des augmentations salariales et encourager des investissements bien nécessaires dans les services publics tels que les transports et l’aide à l’enfance.
La Commission devrait publier un livre blanc sur le socle des droits sociaux en mars prochain.
Déclarations de fédérations syndicales européennes :
Pour Sam Hägglund, Secrétaire général de la Fédération européenne des travailleurs du bois et du bâtiment (FETBB) : « Suite eu Brexit, le socle [des droits sociaux] est une occasion de créer une nouvelle Union européenne des et pour les citoyens qui tourne le dos au nationalisme et au populisme vulgaire. »
« Seul un socle social ambitieux et contraignant constituerait un pas en avant pour reconquérir la confiance perdue des travailleurs dans le projet européen », a pour sa part déclaré Harald Wiedenhofer, Secrétaire général de la Fédération européenne des syndicats de l'alimentation, de l'agriculture et du tourisme (EFFAT).
« Je crois que le socle des droits sociaux peut être un moyen de remettre l’Europe sur les rails mais seulement s’il laisse entrevoir une promesse d’espoir crédible pour les travailleurs et débouche sur un programme d’action social réel et significatif englobant législation, mécanismes d’élaboration des politiques et moyens financiers. Il doit promouvoir les droits syndicaux et le droit à la négociation collective au niveau national et dans les entreprises multinationales et aborder de manière proactive la dimension main-d’œuvre de la numérisation afin de garantir une transition juste pour les travailleurs », remarque Oliver Röthig, Secrétaire régional d’UNI Europa.
« Le socle des droits sociaux est un développement positif s’il en résulte des investissements publics et des services publics de qualité qui répondent aux attentes des citoyens, par exemple en matière de soins de qualité, de justice sociale et d’emplois sûrs. Il faut pour cela mettre fin aux politiques d’austérité » selon Jan Willem Goudriaan, Secrétaire général de la Fédération syndicale européenne des services publics (FSESP).
« L’Europe sociale ne se résume pas à faire fonctionner le marché du travail. Elle doit aussi s’attaquer d’urgence aux problèmes croissants affectant la cohésion sociale ressentis par nos travailleurs au sein des États membres. Pour les travailleurs, le socle européen des droits sociaux doit être une pierre angulaire [du projet européen], pas une pierre tombale » commente Luc Triangle, Secrétaire général d’industriAll Europe.