Bruxelles, 16 avril 2008
Le tribunal irlandais du travail a demandé à la CJE d'interpréter la directive 1999/70 qui met en vigueur l'accord-cadre sur le travail à durée déterminée conclu en 1999 entre la Confédération européenne des syndicats (CES), BUSINESSEUROPE et le CEEP. L'accord-cadre instaure le principe de l'égalité de traitement des travailleurs à durée déterminée avec des travailleurs comparables à temps plein, et oblige les États membres à prendre des mesures afin d'éviter une utilisation abusive de contrats d'emploi successifs à durée déterminée.
Le litige opposait IMPACT, un syndicat représentant les intérêts des fonctionnaires irlandais, et les pouvoirs publics irlandais. Ces derniers ont refusé d'appliquer les clauses de la directive à un groupe de fonctionnaires qui étaient employés dans le cadre de contrats à durée déterminée, alors que l'Irlande n'a transposé la directive dans sa législation nationale qu'avec deux ans de retard. Les travailleurs concernés avaient été employés pendant de longues périodes dans une suite de contrats à durée déterminée, et s'étaient vus refuser une série d'avantages dont bénéficient les fonctionnaires permanents, tels que les augmentations de salaire et les retraites.
Dans un jugement très encourageant prononcé aujourd'hui, les juges européens ont décidé que la clause de non-discrimination de la directive était suffisamment précise et inconditionnelle que pour permettre aux travailleurs de l'invoquer directement devant un tribunal national, et qu'elle s'appliquait aussi directement lorsque des pays transposent la directive avec retard. En outre, l'égalité de traitement est un principe de droit communautaire qui ne peut être interprété de manière restrictive et qui couvre clairement les questions liées au salaire et aux pensions, ce que les autorités irlandaises avaient contesté.
La CJE a également décidé que la directive sur le travail à durée déterminée doit être appliquée et mise en oeuvre par les autorités nationales, compte tenu du principe d'efficacité. La Cour a estimé en particulier que les autorités nationales agissant en qualité d'employeurs publics ne sont pas autorisées à adopter des mesures contraires à l'objectif de la directive à partir du moment où la directive entre en vigueur. Les autorités irlandaises ont profité du retard dans l'adoption de la législation nationale transposant la directive pour renouveler les contrats, pour une durée particulièrement longue (jusqu'à huit ans), juste avant la date de transposition, privant ainsi les travailleurs concernés pendant une durée déraisonnable des droits introduits par la directive.
John Monks, Secrétaire général de la CES, a déclaré: « Après les jugements très négatifs dans les affaires Laval, Viking et Rüffert, le jugement IMPACT est enfin une bonne nouvelle en provenance de la CJE ! Les juges européens estiment que la disposition sur l'égalité de traitement inclut le salaire et la retraite ainsi que la responsabilité des autorités nationales agissant en tant qu'employeurs publics, ce qui est exactement ce que nous attendions. Ce jugement, en particulier l'effet direct de la clause de non-discrimination et le message selon lequel la directive doit être appliquée de manière effective, contribuera à assurer une meilleure protection pour les travailleurs à durée déterminée dans toute l'Europe, ce qui était l'objectif de notre accord. Nous avons déclaré de manière explicite dans l'accord que les contrats indéterminés sont la forme générale de relation de travail. Les contrats à durée déterminée ne peuvent être acceptés que comme un moyen de répondre à des besoins spécifiques et temporaires des employeurs et des travailleurs, et pas pour créer des travailleurs de seconde classe qui seraient privés pendant de longues périodes du bénéfice d'un emploi stable. »