Le droit de grève menacé par une nouvelle législation européenne

Une étude juridique de la CES révèle que le droit de grève pourrait être affaibli par une nouvelle législation européenne destinée à assurer que le marché unique est à même de résister à des crises telles que la pandémie de Covid.

La Commission européenne s’apprête à publier ce jeudi sa proposition de règlement pour un « instrument du marché unique pour les situations d’urgence » (IUMU) qui instaurerait des mesures d’urgence destinées à garantir la libre circulation ainsi que la disponibilité de biens et de services de première nécessité lors de toute crise future.

Cependant, dans le cadre de cette réforme, la Commission envisage d’abroger un règlement existant* sur le fonctionnement du marché unique qui protège explicitement le droit de grève. Aucune protection de ce type n’est prévue dans la nouvelle législation.

Les syndicats s’en inquiètent du fait que cela implique qu’une grève pourrait être considérée comme étant une « crise », ce qui affaiblirait l’action collective en violation des droits internationaux tels que ceux inscrits dans la propre Charte des droits fondamentaux de l’UE et la Charte sociale européenne.

La CES a adressé une lettre à la Commission européenne plaidant pour qu’elle s’assure que le droit de grève soit protégé dans la nouvelle législation.

Isabelle Schömann, Secrétaire confédérale de la CES :

« La pandémie de Covid-19 et la guerre en Ukraine ont démontré l’importance de conventions collectives initiées par les syndicats pour soutenir une économie résiliente soucieuse des besoins des travailleurs et des citoyens durant de telles situations de crise. »

« Le droit de grève est indissociable du droit des travailleurs à négocier collectivement et ne peut dès lors être limité par des mesures d’urgence. La préparation et la réponse à une crise ne peuvent jamais être invoquées pour remettre en cause ou ignorer les droits fondamentaux. »

« Le respect des droits des travailleurs est essentiel pour l’économie sociale de marché de l’UE et ne doit jamais être considéré comme étant un obstacle au fonctionnement du marché unique ».

« C’est la raison pour laquelle la CES demande à la Commission de garantir les droits fondamentaux dans cette législation, particulièrement lorsqu’il s’agit des droits sociaux, des droits des travailleurs et des droits des syndicats. »

 

Notes

Lettre à la Commission 

*L’Article 2 du « Règlement fraise » 2679/98 sur le fonctionnement du marché intérieur stipule que « Le présent règlement ne peut être interprété comme affectant d’une quelconque manière l’exercice des droits fondamentaux, tels qu’ils sont reconnus dans les États membres, y compris le droit ou la liberté de faire grève. Ces droits peuvent également comporter le droit ou la liberté d’entreprendre d’autres actions relevant des systèmes spécifiques de relations du travail propres à chaque État membre ».