Les dirigeants européens demandent à la Commission de faire de la politique industrielle une priorité

Les dirigeants européens ont demandé aujourd'hui à la Commission d'élaborer d'urgence une stratégie industrielle pour des emplois de qualité dans le cadre de l'effort de compétitivité de l'Europe.

Lors d'une réunion à Budapest, les chefs de gouvernement de l'UE ont adopté une déclaration en faveur d'un "nouveau pacte européen pour la compétitivité" : "Nous invitons la Commission à présenter, en priorité, une stratégie industrielle globale pour des industries compétitives et des emplois de qualité".

Cette déclaration apporte une clarification importante à la position de l'UE sur la stratégie industrielle après le message ambigu adopté par l'Eurogroupe en début de semaine. Elle intervient après que la CES a écrit au président du Conseil Charles Michel pour demander que l'importance des emplois de qualité pour la compétitivité soit reconnue dans la déclaration.

Pénurie de main-d'œuvre

Toutefois, cette évolution positive risque d'être compromise par les mesures de déréglementation contenues dans la déclaration, telles que la réduction arbitraire de 25 % des mesures d'information. Les représentants des entreprises ont cité la directive sur la transparence des rémunérations entre hommes et femmes comme un exemple de "charge de travail". Aucune initiative visant à mieux légiférer ne doit conduire à l'abaissement des droits ou des normes en matière d'emploi.

C'est d'autant plus préoccupant que les pénuries de main-d'œuvre ont été un obstacle majeur à la compétitivité de l'Europe ces derniers temps et que les études montrent que les secteurs offrant les emplois les moins qualifiés sont ceux qui ont le plus de difficultés à trouver du personnel. L'absence de réglementation, par exemple pour garantir le respect du droit à la déconnexion, coûte aux travailleurs des millions en travail non rémunéré.

La CES appelle maintenant la Commission à soutenir l'augmentation des investissements dans nos industries, qui devraient s'accompagner de conditions sociales fortes pour protéger et créer des emplois de qualité. Le financement public des entreprises devrait être conditionné au respect de la négociation collective et au réinvestissement d'une part plus équitable des bénéfices pour augmenter la productivité.

Esther Lynch, secrétaire générale de la CES, a commenté la déclaration de Budapest :

"Le rapport Draghi a clairement montré que l'économie européenne souffre d'un sous-investissement chronique, créé par une combinaison de politiques d'austérité et d'une culture d'entreprise qui a vu l'investissement privé chuter au fur et à mesure que les profits augmentaient.

"Le manque d'investissements publics signifie que l'Europe ne dispose pas des infrastructures de base dont les entreprises ont besoin et que le manque d'investissements privés entraîne une baisse de notre productivité.

"Il est clair que nous avons besoin d'une politique industrielle cohérente et puissante pour l'ensemble de l'Europe, soutenue par des investissements accrus grâce à des emprunts de type SURE. Il est essentiel que cet argent s'accompagne d'une forte orientation vers le travail, nécessaire pour protéger et créer des emplois de qualité. En l'absence d'un plan industriel crédible approuvé par les syndicats, un moratoire sur les fermetures d'entreprises et les licenciements forcés est nécessaire.

"Les emplois de qualité créés grâce à la négociation collective sont au cœur des économies les plus puissantes d'Europe. Ils permettent aux entreprises d'attirer et de conserver la main-d'œuvre dont elles ont besoin, aux travailleurs de recevoir la formation dont ils ont besoin et aux entreprises de réinvestir une part plus équitable de leurs bénéfices dans les nouvelles technologies nécessaires à l'augmentation de la productivité.

"À l'inverse, les recherches montrent que notre compétitivité a été gravement compromise par des emplois de mauvaise qualité qui ont créé des pénuries de main-d'œuvre et par une culture d'entreprise de plus en plus irresponsable, qui a vu les bénéfices croissants siphonnés en dividendes et en primes au lieu d'être réinvestis.

Notes

Lettre à Charles Michel en vue du sommet de Budapest
Les salaires sont inférieurs de 9 % dans les secteurs en pénurie de main-d'œuvre
L'avidité des entreprises freine l'investissement

Photo source : CE - Service audiovisuel