Protections contre l’amiante : trop peu, trop tard

Alors que le Parlement européen publie aujourd’hui son rapport sur la question, les syndicats préviennent que la nouvelle limite européenne d’exposition à l’amiante sera insuffisante et arrivera trop tard pour protéger les travailleurs du cancer.

En octobre 2021, le Parlement européen votait en faveur d’une nouvelle limite de 0,001 fibre/cm3 basée sur une étude de la Commission internationale de la santé au travail selon laquelle toute limite supérieure ne protégerait pas suffisamment contre le cancer lié à l’amiante.

Malgré cela, le rapport publié aujourd’hui recommande une limite d’exposition dix fois plus élevée !

La période de cinq ans recommandée pour la révision de sa mise en œuvre est également bien trop longue alors qu’on déplore chaque année 90.000 décès liés à l’amiante en Europe et qu’il n’existe pas assez de mécanismes d’exécution pour faire en sorte que cette révision devienne réalité pour les travailleurs de première ligne.

Cela est particulièrement dangereux dès lors que la propre stratégie « vague de rénovations » de l’UE augmentera le nombre d’ouvriers du secteur de la construction exposés à l’amiante lors de la démolition ou de la rénovation de bâtiments anciens plus susceptibles de contenir cette substance.

Pompiers, enseignants et employés de bureau sont parmi les travailleurs qui continueront à être exposés à une substance responsable de plus de la moitié des décès dus à des cancers contractés au travail dans l’UE et dans le monde. Le rapport doit protéger tous les travailleurs exposés à l’amiante, qu’il s’agisse d’une exposition directe ou de fond.

Cependant, le rapport de l’eurodéputée Véronique Trillet-Lenoir inclut plusieurs améliorations importantes à la proposition de la Commission européenne, notamment des exigences minimales obligatoires en matière de formation pour les travailleurs exposés à l’amiante et la suppression de la notion d’« exposition sporadique et de faible intensité » pour justifier l’abandon de certaines exigences de la directive.

Le Secrétaire général adjoint de la CES Claes-Mikael Stahl :

« Le rapport d’aujourd’hui relève plusieurs lacunes dans la proposition de la Commission pour une révision des protections contre l’amiante en Europe mais il reste insuffisant et arrive trop tard pour protéger les travailleurs du cancer. »

« La science n’a pas changé ces ceux dernières années et, donc, la raison pour laquelle le Parlement recommande une limite d’exposition à l’amiante dix fois plus élevée que celle votée en octobre 2021 n’apparaît pas clairement. »

« Nous exhortons les eurodéputés à écouter les experts et à fixer une limite d’exposition qui garantit une véritable protection contre la principale cause de décès dus à des cancers professionnels dans l’UE. »

« Il serait particulièrement irresponsable de la part des décideurs politiques européens de fixer une limite d’exposition dangereuse après avoir introduit dans la vague de rénovations des mesures qui se traduiront par une exposition à l’amiante de beaucoup plus de travailleurs. »

Tom Deleu, Secrétaire général de la FETBB :

« Tout en nous réjouissant des progrès accomplis lors des discussions sur une meilleure protection des travailleurs contre la menace que représente l’amiante, nous nous étonnons du changement de direction inattendu du rapporteur concernant la limite d’exposition. »

« Nous savons aujourd’hui que les moyens techniques existent qui permettent d’atteindre une limite d’exposition de 1,000 fibre par m3. Nous ne pouvons mettre en péril la santé des travailleurs. Nous insistons donc pour que le rapport du Parlement d’octobre 2021 continue à servir de base pour les futures discussions en trilogue dont les travailleurs attendent un résultat ambitieux. »

« Faute de répondre à cette attente, des milliers de travailleurs du bâtiment seront exposés à des niveaux élevés de concentration d’amiante et la vague de rénovations se terminera par une nouvelle pandémie de cancers liés à cette substance. C’est inacceptable. »

Le Secrétaire général de la FSESP Jan Willem Goudriaan :

« Bien que reprenant certains points en faveur desquels la FSESP et ses affiliés ont mené campagne, entre autres pour la décontamination obligatoire des pompiers et davantage de protection et de formation pour les travailleurs dans le secteur du traitement des déchets, la proposition du Parlement ne reflète pas l’urgence des besoins des travailleurs. »

« Chaque jour, les pompiers et le personnel des services d’urgence interviennent dans des bâtiments sans savoir si de l’amiante y est présente, ce qui les privent de la possibilité de prendre les précautions appropriées et d’enregistrer leur exposition. »

« Aujourd’hui, les pompiers sont confrontés à des incendies dans des bâtiments construits dans les années 1950 et 60. Ils ont besoin d’une limite d’exposition professionnelle plus contraignante. »