Stratégie européenne dans le domaine de la santé et de la sécurité: la Commission manque sa cible

Bruxelles, 27/02/2007

La Confédération européenne des syndicats (CES) rappelle que les accidents du travail constituent une partie limitée des atteintes à la santé causées par le travail. Jusqu'à présent, la stratégie communautaire a toujours privilégié une approche large qui couvre l'ensemble des problèmes de santé. Le choix d'une réduction des accidents du travail comme objectif central constitue un pas en arrière par rapport à cette approche élargie. La CES regrette que les maladies liées au travail ne figurent pas dans la communication de la Commission. Le texte ne fait mention que de « maladies professionnelles ».

Les maladies professionnelles qui apparaissent dans les statistiques ne constituent qu'une très petite fraction de l'ensemble des maladies liées au travail. Moins de 5 % des cancers causés par le travail en Europe sont reconnus comme des maladies professionnelles. Présenter comme un objectif la « réduction continue, durable et homogène » des maladies professionnelles ne permet pas de définir une stratégie réelle. Au contraire, il est vraisemblable qu'une politique de prévention plus efficace devrait aboutir dans une première étape à une augmentation significative du nombre de maladies professionnelles reconnues. Evidemment, un tel constat était incompatible avec l'approche générale de la Commission qui semble considérer la santé au travail surtout comme une variable de la productivité et de la compétitivité des entreprises.

La CES estime qu'une stratégie de prévention se fonde sur des dispositifs précis qui permettent d'impulser des actions concrètes sur les lieux de travail. Les trois dispositifs essentiels de tout système de prévention sont : la représentation des travailleurs, l'inspection du travail et les services de prévention.

En ce qui concerne la représentation des travailleurs, la communication tourne le dos à l'approche participative prévue par la directive-cadre de 1989. Elle ignore complètement l'importance de cette représentation. La pratique montre pourtant qu'il y a une corrélation très forte entre l'existence d'une représentation des travailleurs dans le domaine de la sécurité et les performances réelles des activités de prévention dans une entreprise.

Le sort réservé à l'inspection du travail n'est pas plus enviable. Le texte de la Commission conçoit l'inspection du travail principalement comme un réseau de consultants au service des entreprises et sous-estime gravement l'importance du contrôle et des sanctions contre la « délinquance patronale ».

Quant aux services de prévention, la Communication se borne à quelques suggestions concernant les services externes de prévention. Il s'agit d'une approche trop limitée et contraire à la directive-cadre qui considère à juste titre qu'il est prioritaire de mettre en place des services internes de prévention.

La Commission semble avoir oublié le Traité qui préconise l'harmonisation du milieu de travail par la voie de directives communautaires. Elle privilégie les recommandations, dont la pratique démontre l'inefficacité, et d'autres instruments non contraignants.

Si l'on veut réduire les maladies liées au travail, la CES estime que deux terrains d'action devraient être considérés comme des priorités centrales : la prévention des troubles musculo-squelettiques et la lutte contre les risques chimiques et, tout particulièrement, contre les cancers liés au travail.

Ces deux points figuraient dans la stratégie 2002-2006. Le blocage des initiatives communautaires concernant la révision de la directive sur les agents cancérogènes, l'élaboration de valeurs-limites obligatoires et d'une directive d'ensemble sur les troubles musculo-squelettiques ont constitué des échecs majeurs pour la politique de santé et sécurité de la période écoulée.

La Communication n'augure rien de bon. Elle se limite à une phrase très vague suivant laquelle « la Commission poursuivra, à partir des consultations en cours avec les partenaires sociaux, ses travaux concernant de possibles initiatives » dans ces domaines. La Commission n'ose même plus prononcer le mot « directive » qui figurait pourtant dans sa stratégie pour 2002-2006 ! Après cinq années de tergiversations, la CES aurait souhaité que la Commission se fasse une idée plus précise des « possibles initiatives » !

Pour plus d'informations:Laurent Vogel,

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