21ème Congrès - Confédération générale du travail - Force ouvrière

Lille, 27/06/2007

To be checked against delivery

Je vous remercie de m'avoir invité à votre vingt-et-unième Congrès. C'est la deuxième fois que je suis parmi vous. Votre Congrès de Villepinte fut le premier où, en tant que secrétaire général de la CES, j'ai essayé de m'exprimer en français. J'espère que vous allez pouvoir constater mes progrès.

Depuis votre dernier congrès, l'Europe et le marché du travail européen continuent de subir de profondes modifications.

L'émergence d'immenses pays comme la Chine et l'Inde bouleverse les rapports entre continents, entre pays, mais aussi entre l'Europe et les autres continents. Nous sommes face à un marché mondial, où règne trop souvent le non respect des droits fondamentaux tels qu'ils sont définis par l'Organisation internationale du travail. La préparation des jeux olympiques en Chine, comme l'a dénoncé la Confédération syndicale internationale, a montré qu'un véritable droit syndical y est encore bafoué.

Oui, je le dis avec conviction. Nous avons besoin d'une Europe forte et démocratique qui, en fonction de son histoire parfois tragique, reste aujourd'hui unique car elle défend et promeut son attachement aux principes et aux droits démocratiques fondamentaux.

En revendiquant un modèle social européen, nous demandons le respect des règles telles que le droit à la négociation, le droit à l'organisation, le droit de grève, droit de grève dont la CES réclame l'application au niveau européen. Nous revendiquons la cohésion sociale, la solidarité avec de vrais systèmes de protection sociale, de vrais services publics.

Nous n'acceptons pas que le modèle social européen soit soumis aux exigences à court terme du capitalisme financier.

Au contraire, c'est en réclamant plus de droits, en s'appuyant sur des relations sociales fortes et développées que nous pourrons prendre en compte des aspirations nouvelles dans des domaines plus étendus tels que la santé, et la protection de l'environnement.

L'Europe aura alors toutes ses chances d'être plus innovatrice, plus productive et compétitive dans le monde.

Avec la directive Bolkestein, nous avons démontré notre détermination contre une Europe passoire, où chacun pourrait faire ce qui lui plaît et où cela lui plaît. Nous avons démontré aussi que le syndicalisme a un rôle irremplaçable

Nous avons eu aussi d'autres succès comme avec la législation européenne sur les substances chimiques (REACH) pour la responsabilisation de l'industrie dans la protection de la santé des travailleurs.

Cependant, beaucoup reste à faire: la directive sur le temps de travail est au point mort, comme l'est aussi celle concernant les agences intérimaires dans l'Union européenne.

Je le répète, garantir la démocratie, c'est garantir les droits de tous et de chacun.

Un défi majeur est devant nous : le débat sur la flexicurité. Les solutions proposées par la Commission à l'équation entre sécurité et flexibilité ne prennent pas en considération nos réalités.

Nous refusons l'idée sous-jacente qui règne à la Commission mais aussi dans certains Etats membres. Une idée selon laquelle tous les travailleurs doivent devenir précaires pour empêcher la concurrence déloyale. C'est vouloir renverser 2 siècles d'histoire sociale. Mais, comme vous le savez, nous sommes cartésiens.

Nous devons encore renforcer nos activités autour d'enjeux majeurs qui prendront une place déterminante dans les années à venir, je veux parler de l'énergie et du changement climatique et de leurs implications sur l'emploi.

Pour toutes ces raisons, la CES a décidé de passer à l'offensive lors de son dernier congrès de Séville.

Nous passons à l'offensive parce que nous voulons jouer un rôle pro-actif dans l'élaboration des politiques au niveau européen. Les craintes que suscitent la mondialisation ; la précarisation du travail demandent que nous allions de l'avant.

Comment doit-on passer à l'offensive ? Quels sont nos leviers d'action?

Comme tous les écologistes, nous sommes contre les voitures 4x4. Mais notre action, elle, devra être tout terrain.

Tout d'abord, en renforçant notre rôle de partenaire social. En trouvant des moyens d'amener le patronat - Eurobusiness - vers la table de négociation ; de les y asseoir en face de nous ; de négocier.

Et puis, en intensifiant nos moyens de pression auprès des organes de décision européens. Le travail politique est inhérent à notre métier. Que ce soit les gouvernements au Conseil ; la Commission ; ou le Parlement, nous devons faire en sorte qu'ils nous écoutent. Y compris, la Banque centrale européenne. Nous devons suivre de très près le travail de la cour de justice. Les cas Laval et Viking par exemple ont des incidences profondes sur les travailleurs.

Enfin, nous serons dans la rue si cela est nécessaire.

Nous sommes devenus un acteur incontournable au niveau européen. Nous devons utiliser tous les moyens à notre disposition, en développer d'autres, pour atteindre les objectifs que nous nous fixons tous ensemble.

Et pour réussir, nous avons besoin de votre concours ici, chez vous ; et de l'aide de nos camarades dans tous les pays d'Europe.

De notre côté, nous nous efforcerons de soutenir nos affiliés dans leurs luttes nationales, comme nous l'avons fait en France contre le Contrat première embauche. Nous sommes fiers de la contribution que nous avons pu apporter.

Autre grand enjeu: la Constitution européenne ou plutôt devons-nous parler maintenant de traité modificatif.

Je sais que nous ne sommes pas tous d'accord à ce sujet. Votre représentante s'est exprimée clairement pour vous à Séville.

Le Conseil européen des 21 et 22 juin a rendu son verdict. Nous avons salué l'obtention d'un accord qui débloquait une situation de crise institutionnelle. Mais ce nouveau traité nous laisse encore sur notre faim. Je rencontre ce vendredi le Premier ministre portugais, prochain président de l'Union européenne, et je l'entretiendrai de nos intentions de continuer à faire évoluer ce traité.

Nous nous satisfaisons néanmoins que la Charte des droits fondamentaux soit juridiquement contraignante, sauf au Royaume Uni. La Charte était la partie du Traité Constitutionnel que nous défendions en priorité. En effet, la Charte est la plus progressiste qui existe pour les droits économiques et sociaux. Cette charte est également importante pour le droit de grève, sujet d'actualité en France en ce moment avec les discussions concernant le service minimum.

Cette Charte est aussi un resumé des valeurs de l'union européenne. Et nous avons besoin d'une affirmation de ces valeurs alors qu'un marché européen du travail se développe et s'approfondit constamment.

J'apprécie toujours lorsque des travailleurs de l'Est veulent nous rejoindre. Ceci doit se conjuguer avec un marché européen du travail basé sur quatre conditions clé:

? des conditions de travail et des salaires égaux pour un travail égal sur le même lieu de travail et sur le même territoire,
? le respect des conventions collectives nationales et des systèmes de relations professionnelles,
? un accès égal aux prestations sociales pour tous les travailleurs,
? et des outils de contrôle et de mise en oeuvre pour les partenaires sociaux.

Comme Guy Ryder vous l'a dit lundi, l'unification syndicale a progressé depuis la création de la Confédération syndicale internationale en novembre dernier. La CES a joué le rôle qui est le sien dans ce contexte mondial. En effet, nous avons pris l'initiative et démontré notre engagement au sein du Conseil régional pan-européen qui comprend les syndicats de Brest à Vladivostok.

Pour conclure je tiens à remercier les représentants de FO: Jean-Claude et Yves pour leur participation à notre comité exécutif. Je les remercie vivement pour leur contribution à nos travaux.

Il y a trois ans, à Villepinte, je vous avais dit que j'avais besoin de votre soutien et de votre énergie. La participation de Force Ouvrière, et des autres organisations syndicales françaises à la CES est un atout majeur pour le syndicalisme européen.

N'oublions jamais pourquoi nous sommes là: pour être à l'offensive pour les travailleurs européens. Nous le ferons ensemble.

Je vous remercie de votre attention.

27.06.2007
Discours